Le géant des réseaux sociaux TikTok a entamé sa défense juridique contre le projet de loi américain visant à forcer sa cession à des intérêts américains. Lors de sa première journée au tribunal fédéral, les représentants de l’entreprise ont avancé que ce projet de loi viole les droits des 150 millions d’utilisateurs américains de l’application.
Un angle intéressant qui soulève des questions de fond
L’argument de TikTok se base sur le premier amendement de la Constitution américaine qui protège la liberté d’expression. Selon l’entreprise, forcer la cession revient de facto à une interdiction, étant donné la complexité de répondre aux exigences dans les délais impartis. Cela priverait donc les utilisateurs de leur droit à s’exprimer et consommer le contenu de leur choix.
Cependant, le gouvernement américain reste confiant que le projet de loi sera maintenu pour des raisons de sécurité nationale. Les sénateurs ont été briefés par des experts qui ont souligné les risques que ferait peser le lien entre TikTok et la Chine :
- La possibilité que le gouvernement chinois collecte des données sur les utilisateurs américains à des fins malveillantes
- Le risque que TikTok diffuse du contenu pro-Chine à la demande du Parti communiste pour influencer l’opinion internationale
Cependant, très peu de détails concrets sur ces briefings ont été partagés publiquement. Cela rend difficile de se forger une opinion éclairée sur le sujet pour le grand public.
L’opinion publique commence à basculer
Malgré le manque d’informations, un récent sondage montre que de moins en moins d’Américains soutiennent désormais une interdiction pure et simple de TikTok. Beaucoup semblent considérer que leur appréciation de l’application prime sur des risques perçus comme hypothétiques.
Si TikTok perd cet appel, il pourra demander à ce que l’affaire soit réentendue par l’ensemble du panel de la cour fédérale, voire demander à la Cour Suprême de revoir la décision.
Nous sommes donc encore loin d’un dénouement et d’un éventuel arrêt de TikTok aux États-Unis, même si techniquement cela pourrait arriver dès janvier si l’entreprise ne parvient pas à faire plier la justice.
Rebondissement possible en cas de victoire de Trump
Un élément pourrait cependant changer la donne : la réélection de Donald Trump en novembre. Le candidat républicain a en effet répété qu’il « sauverait » TikTok s’il revenait au pouvoir.
Une promesse électoraliste pour attirer le vote des jeunes ? Ou une véritable divergence de Trump avec ce projet de loi, alors même que c’est lui qui avait initialement proposé d’interdire TikTok en 2020 ?
Son argumentaire a en tout cas changé. En 2020 il voulait punir la Chine pour le Covid, aujourd’hui il prétend protéger la démocratie américaine de l’influence de Facebook ! Quoi qu’il en soit, s’il est élu, peut-être trouvera-t-il un moyen d’outrepasser le vote du Congrès par décret.
ByteDance joue son va-tout
Cette bataille juridique est cruciale pour la maison-mère chinoise de TikTok ByteDance. Déjà sous pression dans son pays où le gouvernement resserre la vis réglementaire sur les géants technologiques, l’entreprise a besoin de maintenir ses opérations à l’international.
Perdre le marché américain serait un coup dur, non seulement financièrement mais aussi en termes d’influence et de soft power pour la Chine. C’est pourquoi ByteDance met toutes les chances de son côté avec cette défense juridique agressive.
Un feuilleton qui ne fait que commencer
Cette première journée au tribunal n’est que le début d’un long processus. Les juges n’ont pas encore indiqué la direction que prendrait l’affaire. Et avec si peu d’informations publiques sur les arguments sécuritaires du gouvernement, il est très difficile de prédire l’issue.
Une chose est sûre : cette bataille autour de TikTok cristallise de nombreux enjeux – économiques, politiques, sociaux, générationnels – et continuera de faire les gros titres dans les mois à venir. Affaire à suivre de près pour quiconque s’intéresse aux nouvelles technologies, à la géopolitique et à la liberté d’expression à l’ère du numérique.
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