Imaginez des montagnes qui deviennent soudain le décor d’un spectacle médiatique géant, où des coureurs ordinaires se transforment en véritables stars numériques, suivies par des centaines de milliers de personnes en direct. En 2025, l’ultra-trail n’est plus seulement une discipline réservée à une élite endurante : c’est un phénomène culturel, un terrain de jeu marketing ultra-puissant et une véritable machine à storytelling pour une nouvelle génération de créateurs. Avec plus de 12 millions de runners en France et un UTMB qui rayonne dans 26 pays, le trail explose et attire les marques comme jamais auparavant.

Derrière ce boom se cachent des personnalités qui cassent les codes du sport traditionnel. Parmi elles, Clément Deffrenne, plus connu sous le pseudo @clemquicourt ou « Clem qui court », cumule près de 800 000 abonnés sur les réseaux. Son secret ? Un mélange explosif d’humour geek, d’autodérision et d’une vraie passion pour les grands espaces. Plongeons dans les coulisses de cette révolution à travers son parcours hors norme et les leçons marketing qu’il nous livre.

De l’île Maurice à la Diagonale des Fous : un virage à 180°

Clément n’a pas grandi avec des chaussures de trail aux pieds. Étudiant appliqué, il part s’installer à l’île Maurice après ses études, décroche un poste de chef de produit dans les jeux de société… et s’ennuie ferme. Six mois plus tard, lassé de ne rien connaître de son île malgré le sable blanc sous ses fenêtres, il lace ses baskets pour un premier trail de 50 km et 3 500 m de dénivelé positif. Un baptême du feu.

Ce qui devait rester une expérience personnelle devient rapidement une compulsion de partage. Timide de nature, il crée un compte Instagram en juillet 2023 presque par hasard, juste pour raconter ses aventures à ses proches. Un an plus tard, il s’aligne au départ de la mythique Diagonale des Fous à La Réunion : 160 km, 9 000 m de D+. L’expérience est si forte qu’elle agit comme un déclic existentiel.

J’avais besoin de passer du temps dehors, alors j’ai démissionné en avril 2024.

– Clément Deffrenne (@clemquicourt)

Ce choix radical illustre parfaitement la tendance actuelle : de plus en plus de profils issus du digital, du gaming ou du marketing classique basculent vers le contenu sportif authentique. Ils y trouvent à la fois du sens et une opportunité économique viable.

Pourquoi le trail attire-t-il autant les créateurs non-athlètes ?

Contrairement au running classique ou au cyclisme sur route, l’ultra-trail offre un récit naturellement dramatique : nuits blanches, hallucinations, dépassement de soi, paysages grandioses, solidarité entre coureurs… Autant d’éléments qui se prêtent parfaitement au format vidéo vertical et au storytelling émotionnel des réseaux sociaux.

Clément arrive dans cet univers avec un bagage très différent : culture internet, Twitch, jeux vidéo, humour absurde. Il constate rapidement que la majorité des contenus trail existants se focalisent sur la technique (matos, nutrition, plans d’entraînement) ou la performance pure. Lui décide de prendre le contrepied.

« J’ai voulu proposer autre chose : des contenus qui parlent du trail, sans être pédagogiques, pour rendre ce sport intéressant et divertissant. »

Cette approche fait mouche. En important ses références geek (notamment les fameuses killcams issues des FPS), il crée un pont entre deux mondes qui s’ignoraient : les gamers et les trailers. Résultat : une communauté intergénérationnelle qui se reconnaît dans son ton accessible et décalé.

La killcam : quand le gaming s’invite en montagne

La signature de Clem qui court, c’est incontestablement la killcam. Concept directement emprunté aux jeux vidéo multijoueurs, elle montre le moment où il dépasse un concurrent, souvent avec un commentaire hilarant et une mise en scène exagérée. Ce qui aurait pu passer pour du second degré moqueur devient au contraire un hommage drôle et bienveillant.

Cette trouvaille géniale permet plusieurs choses simultanément :

  • Créer un running gag reconnaissable immédiatement
  • Humaniser la compétition (on rit de soi et des autres)
  • Attirer un public qui ne se serait jamais intéressé au trail autrement
  • Générer des formats courts ultra-viraux sur Reels et TikTok

Preuve de son efficacité : certaines vidéos dépassent les 10 millions de vues. Un levier puissant pour les marques qui cherchent à toucher une audience jeune et ultra-connectée.

Construire la hype autour d’une course de plusieurs jours

Une des grandes forces de l’ultra-trail pour le marketing digital, c’est sa durée. Une course peut durer 20, 30, 40 heures, voire plusieurs jours. Cela offre une fenêtre de diffusion unique, bien plus longue qu’un match de foot ou un concert.

Clément explique sa méthode pour entretenir cette hype :

  • Teasing long plusieurs mois avant l’événement
  • Contenus réguliers pendant la course (vidéos à chaque ravitaillement quand possible)
  • Surprises et happenings spontanés
  • Mélange d’humour et d’émotion brute

Pour l’UTMB, il a passé trois mois à réfléchir aux formats possibles à chaque point de ravitaillement. Pour l’Himal Trailrun à Oman, son équipe publiait une vidéo à chaque ravito, créant un véritable feuilleton en direct.

« Pour pouvoir grossir, on a dû faire des vidéos avec des hooks pour pouvoir buzzer. Maintenant, plus le temps passe, plus on cherche à raconter des histoires. »

– Clément Deffrenne

Cette évolution est symptomatique d’une maturation du créateur : passer du buzz facile à la narration profonde, tout en gardant l’audience accrochée.

Pourquoi les marques préfèrent les créateurs aux athlètes pros ?

Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Pendant une semaine d’UTMB, on comptabilise 65 millions de vues et 21 millions de comptes touchés. Pour une marque, c’est une visibilité exceptionnelle à un coût souvent bien inférieur à une campagne TV classique.

Les avantages des partenariats avec des créateurs comme Clément sont nombreux :

  • Authenticité perçue : le public croit davantage un créateur qu’il suit depuis longtemps qu’un spot publicitaire
  • Engagement fort : commentaires, partages, interactions bien supérieurs
  • Formats variés : Reels, stories, lives, documentaires longs
  • Ciblage précis : audience passionnée et qualifiée

Clément insiste sur un point clé : il ne travaille qu’avec des marques qui lui laissent une liberté totale. « Elles me suivent pour ce que je suis et pour ce que je véhicule. » Cette confiance mutuelle est devenue la condition sine qua non d’un partenariat réussi en 2025.

De l’échec à la révélation : la leçon de l’UTMB

Même les créateurs les plus suivis traversent des moments difficiles. Pour Clément, l’UTMB 2025 restera marqué par une course très compliquée. Pression énorme, fatigue intense, objectif initial (top 50) loin d’être atteint : il termine 150e après 26 heures de calvaire mental.

Mais l’histoire ne s’arrête pas à la ligne d’arrivée. À minuit, Chamonix l’accueille en liesse. Des centaines de personnes sont là pour lui, pas pour son chrono, mais pour l’aventure qu’il a partagée.

« J’ai compris que les gens étaient là pour la passion, pas pour la performance. Il ne faut pas être le meilleur pour vivre des émotions fortes. »

– Clément Deffrenne

Cette prise de conscience est essentielle pour tout créateur ou marque qui souhaite s’investir dans le trail : l’émotion l’emporte sur la performance brute. C’est ce qui rend le contenu si puissant et si humain.

Les conseils de Clément pour créer du contenu impactant

Ancien marketeur devenu créateur à succès, Clément livre des recommandations précieuses pour quiconque veut se lancer :

  • Commencer tout de suite : on ne devient pas bon du premier coup, il faut tester sans cesse
  • Rester focus : mieux vaut maîtriser 1-2 plateformes avant d’en ouvrir dix
  • Être soi-même : l’authenticité crée un lien indéfectible avec la communauté
  • Accepter l’imperfection : les meilleurs concepts naissent souvent par essai-erreur
  • Prendre son temps sur les formats longs : une vidéo travaillée une semaine entière peut marquer plus qu’une publication quotidienne bâclée

Il expérimente actuellement Twitch avec des lives quotidiens. Même si le format reste imparfait, il y voit un espace de liberté créative plus grand, où l’audience tolère davantage l’expérimentation.

Vers un futur hybride : sport, gaming et storytelling

L’avenir du contenu trail, selon Clément, passera par un mélange encore plus poussé entre sport outdoor, culture gaming et narration immersive. Les marques qui sauront accompagner ces créateurs sans chercher à les formater obtiendront les meilleurs résultats.

En parallèle, l’UTMB Group continue son expansion mondiale, transformant des courses locales en événements globaux à forte résonance digitale. Le trail devient un terrain d’expression marketing à part entière, au même titre que l’esport ou la mode urbaine il y a dix ans.

Pour les marketeurs, les agences et les marques, la leçon est claire : dans un monde saturé de publicité, miser sur des créateurs authentiques qui racontent des histoires humaines offre un retour sur investissement exceptionnel, tant en visibilité qu’en attachement émotionnel.

Et si la prochaine révolution du marketing sportif se jouait finalement… en montagne ?

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