À quelques mois des élections américaines de 2024, Meta vient de prendre une décision lourde de conséquences : lever toutes les restrictions sur les comptes Facebook et Instagram de l’ancien président Donald Trump. Cette annonce, passée relativement inaperçue vendredi dernier, redonne à Trump les pleins pouvoirs sur ses réseaux sociaux de prédilection et la possibilité de relancer sa machine publicitaire à plein régime.
Retour sur la suspension des comptes de Trump
Rappelons que les comptes de Donald Trump avaient été suspendus par Meta en janvier 2021, dans la foulée des émeutes du Capitole. Le géant des réseaux sociaux avait alors estimé que les propos de l’ancien président avaient joué un rôle d’incitation à la violence. Son Oversight Board indépendant avait ensuite appelé Meta à définir des règles plus claires concernant ce type de suspension, ce qui avait conduit à l’imposition d’un délai de 2 ans pour des décisions similaires à l’avenir.
Cette suspension avait été un coup dur pour Trump, qui avait fait de Facebook et Instagram des outils clés de sa stratégie de communication politique. En 2019, son équipe de campagne y avait dépensé plus de 20 millions de dollars rien qu’en publicités Facebook. Si Twitter était son canal favori pour communiquer directement avec sa base, Facebook était crucial pour promouvoir son agenda auprès de certaines catégories d’électeurs.
Le timing de la décision interroge
Le choix du moment pour annoncer cette décision ne doit rien au hasard. Comme l’explique Meta :
Avec les conventions des partis qui arrivent, dont celle des Républicains la semaine prochaine, les candidats à la présidence seront bientôt officiellement nommés. Dans notre évaluation de notre responsabilité de permettre l’expression politique, nous pensons que le peuple américain devrait pouvoir entendre les nominés s’exprimer sur une base équitable.
Concrètement, Trump retrouve tous les privilèges d’un utilisateur lambda et ne sera plus soumis à une modération renforcée. Ses posts seront toutefois examinés selon les mêmes Community Standards que les autres, notamment en matière de discours de haine et d’incitation à la violence. Un retour à la normale en somme, mais pas anodin au vu du poids publicitaire que représente le candidat Trump.
Trump va-t-il délaisser Truth Social ?
Depuis sa suspension, Trump s’est rabattu sur son propre réseau social, Truth Social, auquel il est en partie financièrement lié. Pour autant, difficile d’imaginer qu’il se prive du levier publicitaire que constituent Facebook et ses 2,9 milliards d’utilisateurs actifs. D’autant que son équipe de campagne a déjà recommencé à y diffuser des publicités ciblées, axées pour le moment sur ses meetings à venir et des appels aux dons.
Par le passé, la publicité Facebook de Trump a souvent misé sur des messages clivants destinés à susciter des réactions fortes chez certains segments électoraux. Il sera intéressant de voir si cette stratégie sera reconduite, et si la modération de Meta y mettra le holà le cas échéant. Une chose est sûre, ces publicités, compilées dans la Facebook Ad Library, feront l’objet d’une surveillance accrue dans les mois à venir.
Cette réintégration de Trump concrétise en tout cas la logique de Meta, déjà annoncée en janvier dernier, d’un retour à la normale concernant son compte. Une façon de se défausser de la responsabilité de la modération sur ses algorithmes et ses règles générales. Mais vu le poids électoral et financier de Trump, et les troubles démocratiques du 6 janvier 2021, peut-on vraiment parler d’un utilisateur comme les autres ? L’avenir des réseaux sociaux comme arbitres de la vie politique se joue aussi sur ce type de décisions.
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